LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

LES PREMIERS LES DERNIERS, les âmes simples

Poétique near-apo      Road Movie                                               

Bouli Lanners 

**** 

 

 

 

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-  À la télé, y z'ont dit c’est la fin du monde…

-  Comment tu t’appelles?

-  Jésus

 



Petites touches d’humour décalé. 

Elles signent ici et là, et toujours avec élégance, cette envoûtante quête d'amour poétique aux allures de conte d'apocalypse.

 

 

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Mission nébuleuse de chasseurs de prime fatigués, lançés à la recherche d’un portable pour le compte d’une organisation mystérieuse. Quête éperdue d’un simple d’esprit accompagnant amoureusement une ex petite fille aux allumettes toute aussi fragile mentalement à la recherche de sa fille. Et au milieu, un certain Jésus. Étrange messie, un poil déplumé et vieillissant, faisant ce qu’il peut pour venir en aide aux plus désemparés. Ça se passe aujourd’hui ou demain. Ici ou ailleurs.

 

La sensation de fin du monde hante les landes de ce plat pays étiré jusqu’à l’horizon. Une Beauce aux couleurs fanées sous un ciel plombé. Tableaux instantanément universels somptueusement découpés par un scope westernien et une photographie sublime et acérée. Une ambition plastique de premier ordre qui contraste à merveille avec le minimalisme de l’écriture et l'apparente simplicité des enjeux dramatiques. 

 

 

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Il faut dire que Bouli Lanners, scénariste et réalisateur de ce petit bijou parfaitement ciselé mais également du micro road-movie Eldorado, est un de ces précieux cinéastes qui parle doucement au regard. On peut trouver ça chiant mais ce refus de l’intrigue trépidante, cette lenteur bienvenue me console de trop de films frimeurs et tonitruants. Il y a du Jarmush et du Kaurismaki dans cette langueur envoûtante au riffs de guitare planants. 

Le paysage déroule l'histoire. Esthétiquement l’oeuvre est une réussite de tous les plans. Dans le genre déprimant c’est absolument magnifique. Une merveille de photographie désaturée signée Jean Paul de Zaetidj (déja à l'oeuvre sur Eldorado)

 

Cette quête d'amour et de sens dans un monde qui chavire embrasse ici quelques codes du cinéma de genre. Au-delà des références à l'univers du western j'ai lu ici et là quelques virtuoses clins d'oeil, l'espace d'un plan parfois, à La Route au Livre d’Eli ou The Rover, le voyage offre aussi un bel hommage au post-apo. Le monde autour de ces personnages encore habités par l'amour et la bienveillance semble déjà foutu.

Cette déclaration d'amour au western comme au cinéma d'anticipation file de l'altitude à ce micro road-movie et  pare de noblesse tous ces visages fatigués, marqués par la vie et souvent noyés dans le silence. Un silence qui règne en maître 1h30 durant. 

Les quelques lignes de dialogues, drôles, tristes, touchantes parfois absurdes, s’égrennent comme autant de suppliques dérisoires sur la scène de ce théâtre de la désolation. Un univers poliment désespéré (on sourit souvent) que n’aurait pas renié Samuel Beckett. C’est En attendant Godot mais avec une fraiche pincée d'espoir en plus. Car Les Premiers, Les Derniers est un film qui déborde de tendresse et d'humanité. Une leçon d'amour au coeur de terres arides.

 

 

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Et ce conte de belle facture tient aussi parce qu'il est habité par des acteurs épatants. Un Dupontel tout d'un bloc et jouant la réserve (une sobriété de jeu qui lui va à ravir)  et un Bouli Lanners aussi massif que fragile. Deux bonnes gueules de cinoches. Notons les Savoureuses apparitions de deux géants, Michael Lonsdale et Max von Sydow. Magnétiques sans forcer avec leurs voix aux mélodies si particulières. J'attribue également une mention spéciale à Suzanne Clément (Mommy, La Taularde) dont la présence aussi intense que bienveillante éclabousse avec bonheur ce crépuscule. La douceur lasse de son regard incarne toute l’humilité de ce film jamais prétentieux. Surtout lorsqu'il se pose sur le petit couple d'handicapés joués avec délicatesse par deux inconnus vibrants de sincérité et spontanéité.

 

voici un poème tranquillement bouleversant. 

Parabole singulière aux accents bibliques dédiée à la noblesse des âmes simples et des oubliés. Geste des derniers humains dans un monde où les puissants ne sont plus que des marchands et des trafiquants voués à s’entretuer. Une belle histoire de chasseurs de prime paumés se révélant chevaliers aux secours des plus innocents. Une mission pleine de promesse dont notre ultra-moderne moyen-âge a bien besoin. 

Avec l'immense ciel de la Beauce comme témoin et le souffle de l'amour absolu. Celui des plus innocents.

Les premiers.

 

 

 

 Francisco,

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

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2016

 

1h35

  

Réal:

Scénar:

(screenplay)

Acteurs:

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28/09/2016
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