MOONLIGHT, you blue
Portrait Drame Coup de coeur 2016
Barry Jenkins
*****
- Who is you, Chiron?
- I'm me man. I ain't trying to be nothing else.
Trois regards pour une seule vie.
Trois actes parfaitement découpés se déroulant avec une limpidité et une simplicité admirables. Récit de résilience, de résistance et d'amour, Moonlight frappe fort et juste par ses dialogues épurés et ses silences.
Une partition à la respiration profonde, royalement défendue par tous les acteurs. Tous habités par leurs rôles. De l'enfant mutique à l'adolescent tourmenté jusqu'au colosse aux pieds d'argile le réalisateur Barry Jenkins assure une direction d'acteur impériale en conservant l'âme du personnage d'un acteur à l'autre.
Les seconds rôle ne sont pas en reste. L'oscarisé Mahershala Ali (House of Cards, Treme, Green Book) bouleverse en dealer se découvrant une solide fibre paternelle. Entre hurlements et regards effarés, Naomie Harris (Skyfall, Mandela) assure une prestation déchirante en mère junkie. Un rôle à l'arraché qu'elle a dû boucler en trois petits jours de tournage. Le résultat est un authentique tour de force. Mais il faudrait citer l'ensemble du casting.
Vous l'aurez compris, Moonlight est au service de l'humain au-delà d'un parcours de violence et de douleurs profondes. Ce poème rude et tendre à la fois touche directement au coeur par la pertinence de sa mise en scène comme de sa photographie. Une image tout sauf lisse à la patine riche en matière. La mise en scène et les choix de cadres déroulent un découpage de chaque séquence développant une forme de sobriété virtuose. Parce que tout est transcendé par l'intelligence du regard du réal et scénariste Barry Jenkins. Et ce récit tragique comme murmuré, à l'image du taiseux Chiron, est soutenu par la B.O aérienne et "sacrée"de Nicholas Britell.
Devenir ce que l'on est. Quelle que soit notre manière d'aimer. Un chemin heurté, difficile. Pas besoin de longs discours pour révéler les failles, les paradoxes et la nature résolument multiple des êtres. Le réalisateur Barry Jenkins l'a bien compris. Alors, il fait du cinéma. Moonlight n'impose jamais un discours. Il se regarde comme la toile d'un peintre exploitant aussi bien la grâce que la pleine matière du réel et résonne comme un chant, offert à la bienveillance et au pardon.
Pour son premier long-métrage, Barry Jenkins nous offre une oeuvre profondément humaniste délivrant à chaque séquence, de la plus tendre à la plus violente, une poésie universelle et sans posture. Un miracle de distance et de maitrise pour un premier film!
L'humilité du propos m'a laissé le coeur au bord des yeux et signe, pour moi, les débuts d'un grand réalisateur.
C'est simple, beau et bouleversant.
Moonlight est inoubliable.
- I should have cried too much sometimes I feel like I'm just gonna turn into drops.
Francisco,
Three Times
Universel
2016
1H50
Le Blu-ray Au-delà du piqué on se régale des couleurs et tout ça sans jamais faire dans le lisse. Une image riche en matière et textures aussi hypnotisante que le jeu des acteurs. Que c'est beau!