WYATT EARP, l'incompris

Western mélancolique Drame

Lawrence Kasdan

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Réglements de comptes à OK Corral.

Il y a trente ans, sur le même thème et sorti à quelques mois d’intervalle, Wyatt Earp succéda à Tombstone dans les salles. Si Tombstone (George.P.Cosmatos) offrait à l’époque un spectacle plus direct, fun et énergique, je suis obligé de reconnaitre qu’il a bien mal vieilli. Mise en scène, Jeu, costumes, décors, Scènes d'action à la Rambo, et cabotinage à tous les étages…

Le Wyatt Earp de Lawrence Kasdan (Silverado, Grand Canyon), qui m’avait à l’époque un peu désarçonné par la lenteur de son rythme, a prit aujourd'hui sa juste dimension. Le remonter aujourd'hui de la cave ou la critique l'avait laissé c'est découvrir un cru assez satisfaisant à déguster sereinement. Pour les fans de Costner au far-west il ne tape pas dans l'incontournable, il n'a ni la fraicheur de Silverado, ni l'efficacité d'Open Range est n'est pas traversé par le souffle épique de Danse avec les loups. Mais il existe et révèle la part obscure d'un acteur de légende qui apparait ici empâté, le cheveu plat et légèrement dépressif. Un état qui convient à la mélancolie de l'ensemble.

Boudé quasi unanimement au moment de sa sortie la version de Kasdan avait tout pour dérouter le spectateur. Contrairement à ce que laissait présager les bandes annonces de l'époque, il ne s'agit pas d'une grande fresque au traitement hollywwoodien mais bien d'un drame, celui d'un homme prisonnier de sa propre légende. Kasdan n'exhalte ici aucun héroïsme. Le film avance calmement dans les pas d'un homme aussi déterminé que hanté et ombrageux. Le Wyatt Earp de Kasdan est un homme austère, marqué par le deuil de sa première épouse et embarquant ses frères dans un cycle de violence qui leur coûtera cher. Même l'épisode d'Ok Corral, au coeur du récit, est traité d'une manière sèche, abrupte, presque aride.

Lawrence Kasdan s'intéresse moins à ce gunfight légendaire (les films à ce sujet ne manquent pas) qu'à la manière dont le destin de cet homme et ses frères, pris dans l'engrenage de la violence, va basculer et les transformer. Les affrontements forgent la légende mais dévastent les vies.

Avec ce film, Kasdan égratignait ainsi le mythe et replaçait l'homme au premier plan. Un parti-pris qui, hélas, a déchainé les critiques, déçu et continuera de décevoir nombre d'amateurs de westerns. Le blu-ray de Wyatt Earp est ainsi condamné à hanter les bacs à promo....

Et pourtant, Co-scénariste aux cotés de Dan Gordon, le réalisateur dessine le profil de ces frères et de leurs compagnes avec justesse et sensibilité. Kevin Costner apporte épaisseur et humanité à ce personnage psycho-rigide solitaire et taiseux dont l'intégrité absolue n'était pas exempt d'égoïsme et d'obsessions. À ses côtés l'alcoolique et tuberculeux Doc Holliday est incarné par un Dennis Quaid méconnaissable, il perdit 30 kilos pour se glisser dans la peau de cette figure agonisante qui défend face à Costner les plus beaux échanges du film. Grande prestation.

Dialogues brillants, direction d'acteur impériale, Wyatt Earp a encore belle allure. Plus qu’un western voici un biopic sombre et fiévreux, qui a prit trois décennies plus tard, la patine des classiques du genre. Même si aujourd'hui tout le monde s'en fout, Wyatt Earp reste pour moi un bon western au rythme certes languissant. On en sort un peu plombé mais nourrit.

Francisco,