ELECTRA GLIDE IN BLUE, loneliness
Drame Découverte Blu-ray
James William Guercio
****
Encore une pépite fraichement sortie en Blu-ray dans une copie radieuse.
L'occasion de découvrir cette oeuvre un poil oubliée mais nimbée d'une aura culte. Parce qu'il s'agit d'une oeuvre délicieusement inclassable. Drame, polar, road-movie circulaire au coeur de Monument Valley, hommage au western, mais également oeuvre formellement fascinante, tant au niveau de la mise en scène et du découpage que du montage et du travail sur le son. Les acteurs sont ovniesques avec à leur tête un Robert Blake ultra-charismatique.
Quelques mots sur le gars Robert.
Résilient d'une enfance difficile auprès d'un père alcoolique et violent, ex enfant star au début des années 40 (Les Petites Canailles) puis acteur culte de l'adaptation du De Sang Froid de Truman Capote par Richard Brooks (1967) et figure centrale de la série Baretta (1975-78). Il marquera définitivement l'histoire du cinéma avec une dernière apparition à l'écran, totalement glaçante, dans le rôle du Mystery Man, véritable "coeur des ténèbres" du cultissime Lost Highway de Lynch. Je ne m'étendrai pas sur sa vie perso et son inculpation pour meurtre qui a définitivement enterré la carrière de cet inclassable dévoreur d'écran d'1,60m.
Robert Blake, donc. Il me fallait camper un minimum le bonhomme pour comprendre à quel point sa prestation totalement habitée en flic motard pathétique se fantasmant justicier incorruptible sublime ce métrage.
Présenté et conspué à Cannes en 1973 (le pire endroit au monde pour présenter un film), cette oeuvre résolument étrange, peut-être un poil datée ici et là (c'est un cinquante ans d'âge!) mais sans cesse fascinante, reste l'unique réalisation du musicien et producteur de la scène rock seventies James William Guercio (à l'oeuvre pour Zappa et sur le groupe Chicago).
Franchement, on peut saluer l'exigence du monsieur.
Ce qui aurait pu accoucher d'une série B oubliable (à peine 1 million de dollars côté budget) est devenu un authentique manifeste d'indépendance. La modernité dans la manière de conduire le récit comme dans l'art affuté du cadrage délivré dans un scope somptueux en a fait une oeuvre de référence pour tous les amoureux du cinoche underground.
Se privant de son salaire de réal pour se l'offrir, Guercio se paye à l'image un des plus grands chef-op de l'époque. Le génial Conrad Hall. Imaginez le cv du mec lorsque ce maître de lumière pose sa caméra au coeur d'une Monument Valley qui sera ici plus Fordienne que jamais.
Ce type a éclairé et shooté Morituri, Détective Privé, Les Professionnels, Luke la main froide, De sang froid, Duel dans le Pacifique, Butch Cassidy et le Kid, Willie Boy, Fat City. Il signera par la suite quelques perles comme Marathon Man et Le Jour du fléau avant de livrer le minimum syndical dans les années 80 et 90. Il reviendra au sommet à l'aube des années 2000 pour un sublime chant du cygne grâce au talent visionnaire de Sam Mendes sur American Beauty et Les Sentiers de la perdition. Ici, en 73, il est clairement au sommet de son art.
Résultat, cinquante ans plus tard, Electra Glide in Blue est toujours un régal visuel, avec ses fabuleuses lignes de fuite, ses paysages grandioses dévorés de soleil et ses crépuscules mélancoliques, jusqu'à ce long travelling final aussi ample formellement que tragique et dérisoire sur le fond.
Tragique et dérisoire, c'est un peu le motif de cette oeuvre sur la solitude et le désenchantement. Perçue à l'époque comme le pendant réactionnaire d'Easy Rider (total et stupide contresens) ce film à l'ironie mordante mérite amplement d'être redécouvert aujourd'hui grâce à cette courageuse sortie Blu-ray.
- Loneliness. Do you know that loneliness'll kill you deader than a .357 Magnum? Did you know that?
D'une enquête criminelle anecdotique et déceptive qui ne débouchera que sur le désespoir et la folie, Electra Glide se dresse aujourd'hui comme un monument du cinéma indé. D'un personnage à l'autre, tous pleurent leurs rêves perdus et se débattent dans les décombres d'une Amérique post-vietnam qui voit disparaitre pour toujours dans le soleil couchant de Monument Valley le fantôme de John Wayne .
Francisco,
Modern trailer
1973
1h50
Le Blu-ray Une restauration éclatante que l'on devine issue de la restauration 4K de chez crierions Un toilettage de fond qui rend honneur à la chaude photographie du grand Conrad Hal. Le niveau de détail triomphe dans le mythique décor westernien de Monument Valley
Directed by
James William Guercio | ... | (directed by) |
Writing Credits
Robert Boris | ... | (screenplay) |
Robert Boris | ... | (story) and |
Rupert Hitzig | ... | (story) |
Cast (in credits order) verified as complete
Robert Blake | ... | John Wintergreen | |
Billy Green Bush | ... | Zipper (as Billy 'Green' Bush) | |
Mitchell Ryan | ... | Harve Poole | |
Jeannine Riley | ... | Jolene |
A découvrir aussi
- CASQUE D'OR le triomphe de la simplicité
- HOTEL DES AMÉRIQUES, je te poursuivrai toujours...
- LE PRIVÉ, nobody cares but me