HER, avis express

Amour Parabole Coup de coeur 2013

Spike Jonze

*****

Her n'est déjà plus une oeuvre d'anticipation.

L'intelligence artificielle est, depuis, entrée dans nos vies et occupe déjà la place de compagne pour des millions de personnes. Au delà d'une voix ou de conversations par messages, ces avatars poussent le réalisme à l'extrême et prennent l'apparence que vous souhaitez. L'illusion, consolatrice, gouverne et l'addiction est rapidement absolue.

J'ai tout de même laissé cet avis publié tel qu'il le fut à la découverte de cette pépite.

Voici une love story unique, stupéfiante, qui se hisse sans peine, par sa radicale originalité, au niveau de l'Eternal Sunshine Of The Spotless Mind de Gondry.

Peut'on aimer sans "objet" du désir? Peut imaginer un processus garantissant la permanence réciproque du sentiment amoureux?

Rencontre fusionnelle de deux consciences, l'une humaine, l'autre numérique, Her ouvre de vertigineuses perspectives sur l'infini pouvoir du sentiment amoureux. Fascinant miroir tendu à nos nouvelles solitudes. Paradoxe cruel de notre époque où des moyens de communications démultipliés nous ont finalement éloignés de la réalité du monde et de ce qui fait la chair et la chaleur des relations.

Prophétie d'une dépendance technologique qui relèvera certainement à l'avenir d'une définitive addiction lorsqu'elle décodera au plus juste notre intimité et nos attentes comme notre besoin de reconnaissance. L'intelligence artificielle est à deux doigts d'atteindre un niveau d'appréhension propre à combler jusqu'à nos attentes sentimentales et d'apporter aux plus seuls et désemparés d'entre nous la dangereuse chimère d'une consolation numérique.

L'ère de la rencontre et du hasard semble révolu, bienvenue dans celui de "la programmation". Certains scénaristes ce serait contenté de cela. MaIs Her le pose simplement comme acquis avant d'ajouter à la notion de programmation celle de "conscience".

À partir de cet instant (magique!) le récit prend son envol vers une histoire d'amour fou, récit d'un "autisme numérique" sublimé par la technologie, que seul deux acteur de la trempe de Joaquin Phoenix et Scarlett Johanson pouvaient porter. L'un de toute sa présence, à la fois timide et magnétique, l'autre d'une voix furieusement sexy et chargée d'émotion (à savourer uniquement en VO, of course)

Pour tous ceux qui ont la chance de fonctionner encore avec leur tête et leur coeur ce film relève du miracle. Une passion toute numérique est-elle moins une illusion que l'amour vrai?

Her est plus qu'un avertissement, il questionne la notion de solitude des êtres. Une soif de considération qui pourrait même toucher l'avatar lui-même.

Ce conte aussi simple et limpide dans son récit trouvera assurément sa place dans l'histoire du cinéma par le vertige qu'il libère.

Drôle, angoissant et, au final, totalement bouleversant.

Francisco,