LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

Drame      Poème       Chronique sociale

Chloé Zhao

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Perle rare et précieuse.

Un film poétique et douloureux, entre fiction et documentaire, sur une nation qui peine à se relever. On y suit le quotidien du jeune Johnny qui s’apprête à quitter la réserve indienne de Pine Ridge avec sa petite amie, future étudiante à Los Angeles. Jashaun, sa petite soeur de 11 ans ne résigne pas à voir partir son grand frère qui lui apporte tout l'amour et la protection dont elle a besoin. Son autre frère est en prison et sa mère n'est pas vraiment présente.

Rien n'est éludé des conditions dans lesquelles vivent aujourd'hui les premiers américains. Misère, chômage, alcoolisme, délinquance et suicide, plombent toujours le passé et l'avenir. Mais les chants et les prières des ancêtres résonnent encore.

Le film oscille ainsi entre naturalisme et rêveries Malickiennes. Peu de premier film ont ainsi l'ambition et l'art de parler de notre monde et d'évoquer l'invisible avec tant de grâce. Même les quelques maladresses et "hésitations scénaristiques" propre à un "premier film" nourrissent le charme que diffuse ce métrage tendre et rêveur.

Lorsque se déroule le générique de fin, on a envie de remercier chaleureusement Chloé Zhao pour ce document rare et infiniment précieux. Merci de nous avoir fait rencontrer tous ces jeunes, femmes, hommes, enfants qui ont appris "à observer les nuages lorsque l'orage arrive... à trouver la bonne inclinaison pour ne pas que le vent les emporte".

Le dernier plan (que je vous laisse découvrir) est à l'image du film.

À la fois spirituel et d'une simplicité aérienne. Et c'est toute la vie qui passe ainsi dans ce film. Les moments de légèreté comme les douleurs y sont traité avec une égale douceur. Le film s'ouvre et se clôt sur la voix de Johnny.

C'est bien le chant d'une âme qui nous est offert ici. Celle d'un peuple qui cherche à se reconquérir. La septième génération du renouveau qu'évoquait dans ses visions le mythique guerrier Crazy Horse est celle des adolescents d'aujourd'hui. La jeune Jashaun travaillant pour s'offrir une belle robe pour le Pow-wow à venir, incarne ainsi ce retour progressif à la spiritualité et au chamanisme.

Tous les acteurs, la plupart non professionnels, jouent ici leurs propres histoires dans ce récit qu'a écrit pour eux Chloé Zhao. Ils semblent tous être saisis dans leur quotidien. Le charisme renversant de la jeune actrice et l'intensité du jeune acteur principal suffisent à nous tenir attaché au récit de ces journées habitées souvent par l'ennui et l'errance. Mais la beauté est là, partout autour d'eux. Dans cette photographie d'aube et de fin du jour et ses paysages dévorés par le ciel et l'horizon.

La justesse du regard et la délicatesse avec laquelle les paroles et les maux de ce peuple s'expriment ici témoigne du total investissement et du profond respect de la jeune réalisatrice à l'égard de cette communauté.

Son attention portée aux grands sacrifiés du rêve américain ne s'arrête d'ailleurs pas là puisqu'elle initie chaque été au documentaire de nombreux jeunes amérindiens de la réserve de Pine Ridge.  Elle y a vécu plusieurs années et a passé de longs mois à préparer, écrire et composer son film. Un film produit par Significant Production. La société de l'acteur Forest Whitaker.

Je m'étais promis d'acheter et de chroniquer ce titre. Et je suis heureux d'écrire ces quelques mots sur cette belle prière humaniste. Il y a des films comme ça qui répondent à toutes les promesses.

L'oeuvre qui suivra, The Rider (2017), sur les cow-boys de rodéo amérindiens de cette même réserve de Pine Ridge dans le Dakota, sera une petite merveille. Et le suivant, Nomadland, sur les oubliés routards du rêve américain, un humble et pur chef-d'oeuvre.

 Francisco,

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