LES CONFINS DU MONDE, les survivants
Guerre Drame
Guillaume Nicloux
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Grande claque.
Un film âpre, dense, féroce, travaillé dans le nu de la vie.
Les Confins du Monde confirme qu'il existe encore en France des réalisateurs avec du coffre, du coeur et du souffle.
Sur le théâtre de la guerre d'Indochine, Guillaume Nicloux nous entraîne "au coeur des ténèbres" dans les pas du caporal Robert Tassen ivre de vengeance après l'horrible massacre de son frère et sa famille. Une descente aux enfers jusqu'aux portes de la folie, conduite avec un sens brutal de l'ellipse qui exprime à la perfection ce sentiment de perte et frénésie mêlées.
Dans le sillage d'un Gaspard Ulliel transfiguré, littéralement hanté par le rôle (un des plus grand de sa carrière foudroyée) gravite une collection de personnages inoubliables. Cavagna, le frère d'arme, solidement interprété par l'épatant Guillaume Gouix (j'ai pensé à Richard Bohringer jeune), Maï, la putain magnifique, et un Depardieu totalement bouleversant en écrivain perdu aux milieux des brumes de la guerre et d'un deuil inconsolable (il n'est pas bien difficile d'imaginer d'où vient l'évidence de son jeu)
Vous l'aurez pigé, nous sommes loin d'un film "de guerre" mais au plus proche d'un film sur l'horreur, la sauvagerie et l'impossible deuil de notre humanité saccagée qui dévaste les âmes et transforme l'amour en fantôme insaisissable. Difficile de ne pas voir là une déclinaison d'Apocalypse Now et du roman de Conrad dont il s'inspire. En chaque être humain sommeille l'ennemi intime. Notre colonel Kurtz intérieur.
Les Confins du Monde, comme toute épreuve douloureuse, m'a laissé d'abord sans voix, puis heureux d'avoir vécu un grand et vrai moment de cinoche made in France. C'est toute la grandeur et le courage d'un film qui ne cherche jamais à être "confortable" ou séduisant mais ne cogne que sur l'essentiel et sans retenir ses coups.
La violence, terrible, n'est jamais gratuite.
On ne triche pas ici avec les horreurs de la guerre, même si les combats sont rapidement expédiés voir éludés. Quelques visions de cadavres suppliciés, suffisent à exprimer le bout de l'enfer. Les Confins... reste, de la première à la dernière image, un film sans concession.
Grand cinéaste d'atmosphère, Guillaume Nicloux, signe pour moi son "Grand film". À l'ambiance suffocante s'ajoute cette fois une dimension totalement visionnaire qui s'affirmait déjà avec Valley of Love. Une ampleur du propos nourrie par des conditions de tournage que l'on imagine particulièrement éprouvantes.
Second gros coup de coeur made in France après Une Prière Avant l’Aube de Jean-Stéphane Sauvaire, saluons au passage le chef-op de ces deux oeuvres, David Ungaro, pour toutes les ombres et matières de ses image à la patine rugueuse et totalement hypnotique, le nouveau Nicloux prouve que le coeur de notre cinéma bat encore.
Voilà du cinoche avec un regard, des couilles et une âme profonde, débarrassé de toute beaufitude ou pose d'auteur, capable de nous plonger au coeur d'une expérience viscérale confinant au mystique.
Un vrai trip, en somme.
Francisco,
2018
1H40
L'image Une image "hantée" qui ne cherche ni le beau ni l'épate mais dont la riche matière aurait amplement mérité un traitement Blu-ray ... Dommage qu'un des films français les plus puissant de ces dix dernières années termine sa vie sur support SD.
Liens IMDB:
Director:
Guillaume NiclouxWriters:
Jérôme Beaujour, Guillaume NiclouxStars:
Gaspard Ulliel, Guillaume Gouix, Lang Khê Tran |