WATCHMEN (Ultimate Cut), "we are all puppets"
SF Comics Fantastique
Zack Snyder
*****
Rorschach's Journal: October 12th, 1985.
Tonight, a comedian died in New York.
J'ai donc profité de la ressortie Blu-ray 4K de la version ultimate cut (3h25) pour replonger avec délice dans le foisonnant Watchmen de Snyder.
Ce nouveau boitier steelbook du meilleur goût trône fièrement aux côtés de la trilogie Dark Knight de Nolan, l' Incassable chef-d'oeuvre de Shyamalan et le rugueux et westernien Logan de Mangold. Voilà pour la liste de mes films favoris consacrés au héros de nos nouvelles mythologies.
J'ai souvent le pied lourd sur les productions Marvel mais c'est très malhonnête de ma part parce que je suis le premier à succomber à leur puissant pouvoir de divertissement. Je reste un môme, un cinéphile de base, aussi j'ai souvent besoin d'en prendre tout simplement plein les yeux et les oreilles. Quelques titres sont même un peu plus que des modèles d'efficacité. Je pense au Captain America- Le Soldat de l’Hiver, Avengers - Infinity War, Black Panther ou Les Gardiens de la Galaxie qui à leur manière fabriquent du mythe. Mais, voilà, je pense un bon moment et puis j'oublie. Je les considère un peu comme les "pop-corn" ou les "feel-good movies" du genre. Il est important qu'ils existent. Ce sont nos nouveaux westerns. Les pouvoirs des héros sont toujours à la mesure des peurs contemporaines.
Seulement voilà, parfois, dans nos âmes d'amoureux du genre, quelques phares continuent de clignoter dans la nuit de la mémoire. Des étoiles puisant leur lumière non dans d'habiles recettes de producteurs malins mais directement à la source. Au plus profond des prométhéennes racines du mythe. Parce qu'être un super-héros c'est dérober le feu sacré et s'y griller jusqu'à l'âme. Un côté obscur de la Force qui nous rebranche directement à : Watchmen ! Brillantisime et généreuse adaptation d'une "bible"des comics parue en une douzaine de tomes au milieu des années 80.
Dans une réalité parallèle ou un Nixon grotesque effectue son cinquième mandat et alors que les russes s'apprêtent à déclencher un atomique Armageddon un membre éminent d'une ancienne bande d'Avengers surnommés les Watchmen est assassiné. L'un d'entre eux mène l'enquête et tente de ranimer "l'union sacré"en rassemblant les survivants d'une époque révolue. Je vous laisse poursuivre...
Et cette dense, sombre, épique, tortueuse et vertigineuse épopée graphique d'Alan Moore et Dave Gibbons, longtemps réputée inadaptable, est aujourd'hui un film vibrant de passion aussi bien pour l'oeuvre originel que pour le cinéma de genre (clins d'oeils à Docteur Folamour, Brazil, Apocalypse Now, Seven...). Un conte féroce sur le temps, le pouvoir, la quête de sens et la morale, divinement mis en scène et photographié (fidèle Larry Fong, le peintre furieux de 300). Visuellement, du premier au dernier plan, le spectacle est un régal.
Watchmen commence par vous filer une bonne claque dès l'ouverture.
Sublime générique (un des plus beaux de l'histoire du cinéma) sur le "The Times They Are A Changin" de Dylan. 5 minutes ébouriffantes sur cet hymne contestataire embrassant tout l'univers et la genèse des Watchmen marié au contexte politique de l'Amérique des sixties et seventies. Rien que ça. Vous voilà informés. Vous venez d'embarquez à bord d'un fabuleux et cultissime ovni, souvent imité mais jamais égalé, suscitant le débat et conviant au festin les amoureux doux-dingues, fans radicaux et virulents détracteurs.
Watchmen reste, pour moi, le film de super héros définitif.
Merci Zack Snyder !
Après deux bombes ciné que furent l'Armée des Morts et le bourrin mais ô combien jouissif et ultra-graphique 300, ce virtuose de l'image s'attaqua, il y a plus de dix ans, à cette cathédrale du comic book. Un monument indéboulonnable et toujours inégalé du neuvième art aux super-héros tordus, déviants, violents, dépressifs, alcoolos, tous condamnés à une solitude peuplée de souvenirs glorieux car "légalement" hors-la-loi. (j'ai apprécié l'hommage des Studios Pixar à cette loi privant les super-héros de leur rôles dans leurs grandioses et poilants Indestructibles.)
Bien peu d'ouvrages n'ont autant creusé et interrogé les engagements, conséquences, douleurs et ambiguïtés de la lourde charge de justicier. C'est cette densité du propos et cette profondeur qui rendent cette oeuvre universelle.
En s'offrant quelques raccourcis ou arrangements scénaristiques mais en sublimant fidèlement et respectueusement les visions les plus iconiques du roman graphique, Snyder a accompli l'exploit de signer un de ces grands films malades (la complexité de ses ramifications et de ses références peut égarer le novice) qui par ses innombrables qualités et malgré, ou grâce, à ses imperfections, ne s'épuisent jamais et continuent de fasciner à chaque nouvelle vision. À l'image de la BD, on n'a jamais fini d'explorer ce film au trois versions :
Une première version ciné de 2h40 (déjà virtuose mais au goût d'inachevé)
Une Director's Cut de 3h05 (L'ampleur de l'oeuvre enfin révélée, la narration trouve son rythme et le chef-d'oeuvre s'impose)
Et enfin cette version Ultimate Cut de 3h35 insérant la partie animée des funèbres et gores Contes du vaisseau noir (Pas indispensables mais confirmant le nihilisme de l'ensemble)
Il fallait du courage et un vrai talent de visionnaire pour aller au bout d'un projet aussi dantesque et limite "bankable" là ou deux géants comme Terry Gilliam et Darren Aronofski avaient jeté l'éponge. Le Watchmen de Snyder existe et brûle encore. Les héros sont fatigués, désabusés, mais ils n'ont pas pris une ride. Parce l'esprit résolument anti-système du récit d'Alan Moore et le sens du découpage révolutionnaire de Dave Gibbons sont bien présents ici. Le film, à l'image du bouquin (qui trône aussi sur la même étagère) est une oeuvre gigogne, fourmillant d'idées et de personnages passionnants. Très loin de la confortable légèreté Marvelienne ce film se nourri du désespoir le plus noir, et infuse doucement sa philosophie nihiliste sous la radieuse patine d'un grand classique. Personne n'est dupe de cette sarcastique concession au happy-end sur les ruines d'un gigantesque charnier.
Alors, qu'apporte l'Ultimate Cut?
Rien d'indispensable sur le plan narratif, comme je l'évoquais plus haut, sinon un net supplément d'âme. Ces contes du vaisseau noir, impitoyable récit de survivance, insistent sur le caractère originel de cette "malédiction" qui fait de tout parcours de vengeance un chemin vers la folie et la destruction. Fort de ces cauchemardesques séquences animés Watchmen se prend 30 minutes supplémentaires et devient un authentique "film-monstre". Et ça lui va tellement bien.
C'est à l'image du seigneur du récit.
L'immense personnage du Docteur Manhattan, scientifique transformé accidentellement en être omnipotent aux pouvoirs sans limites. Toute puissance condamnant au détachement puis à une solitude éternelle. Toute la "faillite" du super-héroisme s'exprime dans le mélancolique grand bleu de son visage.
Watchmen interroge le divin, ferment premier de la notion de super-héros. Avec toujours cette pleine conscience de l'absurde et de la vanité de nos actions.
Morceaux choisis :
- The most powerful thing in the universe... still just a puppet.
- We are all puppets... I'm just the puppet who can see the strings.
- ... In my opinion, the existence of life is a highly overrated phenomenon.
- Everyone will die!
- And the universe will not even notice.
Sombre, ironique, désespéré et universel.
Alors, Who watch the Watchmen?
Moi, vous, et pour encore un sacré bout de temps ...
Francisco,
Culte
Snyder chroniques
2009
2h40 & 3H25 (Ultimate Cut)
(Le Blu-ray simple) Fourmillant de matière ! Une texture argentique (super 35) d'une classe folle. Habile gestion du grain (plus confortable que sur la précédente édition BR) et niveau de détail à la fête. Noirs profonds et un travail sur la colorimétrie qui fait de chaque plan un festin. Les nouvelles sections animées sont impériales. Que l'on soit fan ou non Watchmen reste aujourd'hui encore une oeuvre visuellement fascinante. Un dix ans d'âge qui vieillit divinement à l'ère du lisse numérique.
Director:
Writers:
David Hayter (screenplay), Alex Tse (screenplay) | 1 more credit »
Stars:
Jackie Earle Haley, Patrick Wilson, Carla Gugino | See full cast & crew »
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