APOLLO 10 1/2, nostalgie
Animation rêverie nostalgique
Richard Linklater
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Quelques mots sur cette pépite.
Le nouvel opus du réalisateur de Boyhood, Last Flag Flying et trilogie Before, repasse à l'animation. 15 ans après A Scanner Darkly, trip cauchemardesque et hallucinatoire, les figures "rotoscopées" de Richard Linklater peuplent cette fois-ci une délicieuse balade dans la mémoire et l'imaginaire d'un jeune garçon.
Une forme de poème sur l'Amérique middle-class des années soixante. Ses rêves, ses aspirations jusqu'à l'entrée dans l'âge du désenchantement. L'époque ou l'American Dream et son "Sky is the limit" allaient être brièvement incarnés par trois cosmonautes légendaires foulant le sol lunaire avant de se noyer dans le bourbier vietnamien et l'assassinat de Kennedy.
C'est aussi le réenchantement du home sweet home des soirées télé que l'on vivaient en famille et de ces séries mythiques qui contribuaient aussi à définir les codes de l'American way of life.
Apollo 10 1/2, les fusées de mon enfance est un bel ouvrage de mémoire mariant aux grands moments de l'Histoire les fantasmes de l'enfance et de l'adolescence d'un cinéaste-écrivain hanté par la fuite du temps. L'animation offre plus que jamais la sensation d'ouvrir un livre puis d'écouter.
Linklater se fait conteur. Le spectateur se laisse porter par la voix-off au fil d'un flux narratif plus en sommaire qu'en séquences. En ce sens, Apollo 10 1/2 rejoint une forme de cinéma littéraire.
Images et musiques toutes plus iconiques les unes que les autres défilent devant nos yeux et devraient résonner dans les mémoires des quadras jusqu'aux aux plus âgés d'entre nous, lectrices et lecteurs bien aimés.
Le cinoche sert aussi à déverrouiller nos sentiments en ravivant l'écho des visions de cet "avant" où nos expériences de jeunesse se vivaient dehors sur nos vélos ou sur le trottoir, au coin d'une rue ou dans un champ, avant d'aller fleurir nos jardins secrets. Autant d'émotions précieuses qui nourrissaient notre âme et que nous n'aurions jamais songer à exhiber sur les réseaux sociaux.
Ici Linklater convie le retour à l'expérience commune, au triomphe de l'imaginaire et exalte toute la poésie de la nostalgie. Parce que seule la mémoire fait l'art.
Francisco,
Chroniques Linklater
2022
1h35