LA MAIN DE DIEU, le coeur de la mémoire
Drame Carnet intime Poème
Paolo Sorrentino
*****
Quelques mots sur cette pépite offerte par le plus grand réalisateur Italo-Fellinien en exercice, chef d'orchestre d'un de mes films de chevet, La Grande Bellezza : il maestro Sorrentino. La Main de Dieu est ma plus belle séance de l'année depuis Nomadland.
Après le Roma de Cuaron, Netflix a permis au grand Paolo de nous livrer son carnet intime, mélodramatique et poétique. Un regard libre et gourmand sur l'adieu à l'enfance et l'entrée dans l'âge adulte. Une balade sensuelle, généreuse, truculente puis bouleversante dans les souvenirs d'un amoureux de la vie et du cinéma. Des petits riens du quotidien aux grands drames. Du rire aux larmes. Le tout porté par une galerie d'acteurs et d'actrices prodigieuse, Toni Servillo fidèle au poste aux côté du jeune Filippo Scotti et côté féminin deux prestations haute-couture de Teresa Saponangelo et Luisa Ranieri. Cette direction d'acteur au sommet sert au mieux la sincérité du propos et souligne un amour des personnages qui filent droit au coeur. Ouais, ça joue et c'est du caviar.
La Main de Dieu, ou l'union du profane au sacré autant qu'un clin d'oeil au but controversé mais légendaire d'un Dieu du stade qui fit entrer Naples au Valhalla du football lors du Mondial 86. Ainsi, de Maradona au moinillon faiseur de miracles, la réalité magique du réalisateur de Youth nous promène de la réalité la plus brute aux instants de grâce et d'éveil avec la même ferveur. Des repas de famille où la vie explose à l'obscurité des salles de cinéma, de la sexualité qui taraude aux deuils fracassants. De l'amour au désespoir. De la tendresse à la folie furieuse, La Main de Dieu embrasse le grand tout. Et Naples n'a jamais semblé aussi belle.
La fluidité de la mise en scène et la chaleur de la photographie de la napolitaine Daria D'Antonio fait passer avec grâce ces deux heures dix de grand cinéma (une découverte en salles aurait été la bienvenue). Il suffit de s'abandonner à la lecture. Se laisser embarquer dans de longues plages méditatives et mélancoliques autant qu'au coeur d'instants tragiques ou de pure comédie. Le rythme est ainsi, comme détaché de toute injonction et ne répondant qu'au courant du souvenir. Sorrentino nous chuchote à l'oreille autant qu'il nous bouscule. l'artiste est ici en pleine maîtrise de son art. Si les femmes plantureuses et les gueules impossibles convoquent toujours autant le fantôme du maître Federico dont la présence et la voix sont ressuscitées le temps d'une mémorable séquence de casting, il y a du Dino Risi dans ce portrait de famille ou même les monstres sont rois. Le réalisateur de The Young Pope lève (un peu) le pied sur le baroque pour s'ancrer dans une réalité plus triviale. Mais la poésie est là, partout. Contaminant chaque plan.
La Main de Dieu est un voyage au coeur de la mémoire. Celle d'une vie dont le terreau tragi-comique constitue le ferment même du meilleur du cinéma italien. Sorrentino signe ici son oeuvre la plus autobiographique et son plus grand film (après La Grande Bellezza) Il s'affirme une fois de plus, par son appétit de cinéma et sa générosité, comme le digne héritier des géants d'hier.
Francisco,
L'avis des lecteurs
Marian-o
" Une ode à la vie, à l'adolescence, au cinéma... c'est beaucoup dire ? Fellini, les rêves, la cruelle réalité, Maradona (divin mais aussi tellement humain dans ses apparitions), Naples (la bête !), la famiglia, les femmes (si italiennes !)... l'art."
Chroniques Sorrentino
2021
2h10
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