JACKIE BROWN, Quentin Save the Queen !!!
Polar soul & langoureux
Quentin Tarantino
*****
- Putain mec, 300 chroniques et t'as jamais publié une seule bafouille sur un Tarantino !
Copain Spinaltap est comme ça.
Il a le don de me faire renoncer au superflu pour aborder l'essentiel.
Il y a ainsi, en ce monde cruel et en proie au désordre, des vérités qui qu'il fait bon rappeler. Même si ça fait mal. Oui, je-n'ai-jamais-chroniqué-un-film-de-Tarantino. Pourquoi ?! Sans doute à cause de l'émotion et de l'enthousiasme qu'ils me procurent ...
Jouir est quelque chose d'intime.
On a pas forcément envie que tout le monde nous regarde.
Et connaissant ma propension à l'emphase et l'hyperbole, je me suis toujours contenu. Parce que, oui, j'aime absolument tous ses films. Même les bavards Huit Salopards m'ont conquis ( je me suis senti comme au théâtre, assis au premier rang). Je considère cet individu comme un authentique génie. Un maître de la synthèse. surfant avec une grâce folle sur les arts délicats de l'image, des mots et de la musique. Un torrent de références somptueusement digérées, vibrantes, palpitantes et explosives. L'esprit seventies dopé à la nitro. Autant de flashs ciné instantanément cultes.
Alors je vais commencer aujourd'hui avec un merveilleux portrait de femme : Jackie Brown ! Un des plus beaux films jamais réalisé sur le mi-temps de la vie. Cet instant ou s'imposent les choix définitifs et les virages à ne pas louper. Parce que le temps presse.
Générique !
Pam Grier, la divine.
Égérie des films de la Blaxploitation dans les années 70 (Coffy, Femmes en cage, Sheba Baby... et Foxy Brown !) Dès le titre, l'hommage est clair, assumé et appuyé. 2h30 d'une magnifique déclaration d'amour à cette actrice à la sensualité dévastatrice qui affiche aujourd'hui une épatante filmo de genre de près d'une centaine de films !
En 1997, Pam a 48 ans.
Quentin la filme comme une icône. Rayonnante, plus charismatique que jamais, le travelling l'épouse dès l'ouverture du film. Vous embarquez avec Jackie ou vous resterez à la porte de ce feel-good polar au rythme langoureux, cultivant avec délice l'art de la fugue et de la digression. Histoire d'une femme entre deux âges, hôtesse de l'air sur une compagnie low-cost contrainte à opérer de petites magouilles avec un trafiquant d'armes et forcée de jouer les appâts pour les flics pour éviter la case prison. Elle va tenter un fabuleux coup de bluff sur un transfert d'un demi million de dollars pour échapper à cette vie sans issue. Charme, suspense, on va trembler pour Jackie.
Inspiré du Rum Punch d'Elmore Leonard, écrivain venu du western (3h10 pour Yuma, Hombre, Joe Kidd) et auteur de nombreux polars ayant inspiré nombres d'oeuvres ciné Tarantinesques (Get Shorty, Hors d'Atteinte, Be Cool) Jackie Brown est un bijou d'écriture. Tempo, humour, punchlines, la fabuleuse galerie d'acteur qui peuple ce merveilleux univers nous transmet à chaque séquence son bonheur d'interpréter pareille partition. Ordell, le savoureux et inquiétant trafiquant d'arme est royalement défendu par l'impayable Samuel L Jackson. Robert De Niro, apathique et l'oeil éteint, se régale de son rôle d'ex-taulard totalement à l'ouest. Bridget Fonda assure en nymphette fatiguée et le tandem de flics joué par Michael Keaton et Michael Bowen fonctionne à plein régime; Clin d'oeil, le flic Ray Nicolette, toujours interprété par Michael Keaton, reviendra faire une apparition dans le Hors d’Atteinte de Soderbergh.
Tous ces personnages vont entrer dans votre vie et il y a peu de chances pour que vous puissiez les oublier. La direction d'acteur est un art. Tarantino y excelle. Sur ce plan, Jackie Brown est un bain de jouvence.
Au coeur de cette royale distribution rayonne donc Pam Grier.
Et son charme va totalement envoûter le préteur sur gages chargé de la sortir de prison.
La scène se déroule durant la première partie du film. Je vais vous parler ici d'une des plus belles scène de coup de foudre de l'histoire du cinéma, et je pèse mes mots. Un tour de magie totalement transcendé par la B.O :
Tandis que de l'ombre surgit Jackie la caméra glisse vers le profond et bouleversant regard du vétéran Robert Forster. (présence de vieux lion et coolitude Clooneysque) Résonne alors le Natural High de Bloodstone, langoureux standard des seventies. Pur instant de grâce cinématographique...
Tout ça pour dire que Jackie Brown, au delà de son intrigue savamment conduite, est d'abord une classieuse et irrésistible lettre d'amour.
Pam Grier face à Robert Forster c'est tout un pan de l'histoire du cinéma.
Une période vénérée par Quentin Tarantino. J'ai cité la période de la blaxploitation pour Pam. Parlons de Forster qui débuta sa carrière en 1967 dans le rôle d'un jeune militaire attisant l'homosexualité refoulée d'un Brando plus névrosé que jamais dans Reflets dans un oeil d'or de John Huston. Puis c'est une figure du petit écran dans les années 70. Une myriade de téléfilm et le rôle titre dans la série Banyon (1971-1973) Un tas de panouilles dans les années 80 et en 1997 Tarantino le fait sortir de l'ombre.
Le poids d'une longue carrière et de nombreuses traversées du désert hantent les regards de ces deux acteurs à qui on ne la fait plus. Et ce spectacle est magnifique. Jackie Brown c'est l'inverse d'un cinéma de branleur et de poseur. C'est le témoignage d'un amoureux fou du cinéma de genre, infiniment respectueux de tout ce terreau underground sur lequel fleurissent les plus solides légendes du septième art.
J'ai revu Jackie hier soir.
Elle a vingt ans et je vous confirme qu'elle n'a pas pris une ride. Si vous ne l'avez jamais vu je me permettrais de vous citer cette brillante réplique qui siffle si bien entre ses lèvres :
- Shut your raggedy-ass up, and sit the fuck down!
Francisco,
Pam !!!!!!
Musique
De quoi se composer une mortelle Jackie-playlist :
Chroniques Tarantino
1997
2H30
LE BLU-RAY : C'est Noël. Piqué, détails, couleurs, Jackie n'a jamais été aussi belle !
Director:
Writers:
Quentin Tarantino (written for the screen by), Elmore Leonard (novel)
Stars:
Pam Grier, Samuel L. Jackson, Robert Forster |
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