MAD MAX FURY ROAD, mon précieux!
Opéra post apo Culte Coup de coeur 2015
George Miller
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Réclamer le silence.
Tenir le steelbook entre mes mains. M'incliner. Puis, doucement, le lever au dessus de ma tête... Attendre le soir pour enfin se tourner vers son écran avec sur le visage l'expression flippante du geek au bord de l'épiphanie. Rictus inquiétant du collectionneur imperméable à toute manifestation du monde réel ayant enfin en sa possession le saint Graal des top-démos.
Rire nerveusement puis lancer la bête...
Partout dans le monde ce rituel assez angoissant vu d'extérieur, sera répété des millions de fois. La cause est bien réelle : Le Blu-ray de Mad Max Fury Road est non seulement disponible mais en vente libre.
Il a rejoint désormais mon doux foyer. Monstre furieux, dantesque, ivre, dingue, viscéralement et brutalement "émouvant". Je vais pouvoir savourer (en 2D de préférence) la photographie électrique de John Seale (Cold Mountain, Le Patient Anglais) la partition musicale barbare et saturée de Junkie XL et la virtuosité du montage de Margaret Sixel. Je prend le temps de les nommer car ils ont fait un boulot extraordinaire. Il faudrait nommer aussi tous ceux qui ont travaillés aux décors, costumes et maquillages car c'est le parfait mariage de tous ces arts, conduits ici à la perfection, qui font de Fury Road ce Show rugissant de moteurs en surchauffe, de métal brûlant, de sueur, de sang et d'éléments déchainés comme je ne pensais plus en voir un jour sur les écrans. Miller a libéré les fauves!
Le désert reprend ses droits, et les monstres mécaniques pilotés par des fous hurlants et un guitariste-lance-flammes se pulvérisent par dizaines dans des torrents de poussière. Après des années arrosés de confortables effets CGI les blockbusters rugissaient mais comme des lions en cage. Oublié la camisole numérique. Mad Max : Fury Road c'est le grand retour de la matière en fusion. Une saine folie déboulant en 3D venant enfin rappeler à tous les bricoleurs du divertissements qui est le patron. Le guerrier de la route ressuscite devant nos yeux, épaulé par une phénoménale amazone, entourée d'un bouquet de nymphes à la beauté surnaturelle, poursuivi par une horde sauvage semblant tout droit échappée du Burning Man, sous la conduite d'un metteur en scène aux semelles de vent. Merci M'sieur Miller !!!!!! À soixante-dix piges, sweet-old-George arrache de leurs chaussons les pantouflards du septième Art et accroche son chef d'oeuvre à une hauteur stratosphérique. Dans le domaine du post-Apo et du bitume qui chante il y aura un avant et un après Fury Road.
Le résultat ?
Il est au-delà des espérances.
Dans la lénifiante "bien-pensance cinématographique grand public" et ses blockbusters aux effets numérique propres sur eux, c'est le grand retour de la rage et de la barbarie. Le septuagénaire George Miller flanque une bonne fessée et rappelle les fondamentaux. Cavaler devant un fond vert c'est bien mignon mais pour tourner un film de dingue qui tienne la route faut se griller au soleil, exploser de la carrosserie et redonner du taf aux cascadeurs. Ici on retouche les fonds, le ciel, on rajoute deux-trois canyons ici et là mais la tôle est bel et bien en fusion.
Pas question d'oublier Mel Gibson, mais les temps ont changé.
La légende de Mad Max reposera toujours sur cette folle énergie. Rage désespérée du combat pour la vie au coeur du chaos. Mais, ici, dans cet univers stérile et barbare, la femme est bel et bien l'avenir de l'homme. Max, version Tom Hardy, réapparait, mais à l'état animal. Une créature folle et hantée par ses démons et ses fantômes. Grognante et apeurée. Ses lignes de dialogues sur l'ensemble du film tiennent sur une feuille.
Seule Furiosa, véritable héroïne du film, campée par une Charlize Theron incandescente, le libérera de sa muselière... Ce n'est pas un hasard si, après une introduction où le personnage de Max semble psychologiquement bien en vrac, le personnage de Furiosa apparaît immédiatement après que surgisse sur l'écran le titre du film. C'est bien la Charlize, la divine, qui est aux commandes de Fury Road!
Quant à vous décrire le spectacle, évoquer la splendeur des images, imaginez les vingt dernières minutes de Mad Max 2 boostées à la nitro revues sous acides et déployées sur deux heures de métrages. Vous aurez une petite idée de ce sprint infernal au pays du cinéma de genre. La "SF port-apocalypse" vous invite à découvrir, et aujourd'hui posséder, sa Sixtine.
Miller n'éborgne pas la trilogie originelle, il revisite le mythe, pied au plancher.
Une forme de reboot transcendant tous les fondamentaux de la saga. Il faut admettre que Mel Gibson ne pouvait plus avoir sa place dans une telle relecture, même si un petit caméo aurait été le bienvenue. Les précédents récits de la trilogie originale suivaient tous une trame assez classique, propre aux genres dont il s'inspirait, western, récit de vengeance, parcours initiatique. Ici, seul le mouvement de la route gouverne.
C'est le "Road-movie" ultime. Celui de la fin d'un monde. Excroissance et dégénérescence hallucinée et hallucinante d'un genre qui a servit de support à tout un pan de l'histoire du cinéma américain. Tout le propos et la force du film reposent sur ce mouvement. ADN du cinoche et principe de vie (et de survie).
Ceux qui aiment aller au cinéma écouter une belle histoire doivent s'abstenir. On s'engage sur la Fury Road pour en prendre plein la gueule. Fuir, affronter, faire demi-tour, affronter de nouveau. Faire demi-tour car il n'existe plus de Terre Promise. Sur ces deux lignes de scénar et quelques dialogues à sniffer, tout un univers se met à hurler.
C'est là tout le génie de Miller. L'image délivre un opéra et le cinéma triomphe. Je sais que je fais dans l'hyperbole, mais là, franchement, ça mérite. Inutile d'attacher vos ceintures, ce cinéma décolle pour ne plus jamais atterrir.
Francisco,
Dompter la bête
Black & chrome
"Pour moi, c'est un film muet avec du son"
G. Miller
Alors, Mad Max Fury Road, meilleur en noir et blanc?
Je ne saurais trancher, tant les deux expériences sont aussi radicales l'une que l'autre. Merveilleusement ré-étalonné pour l'occasion, avec de magnifiques teintes bleutées durant les scènes nocturnes, un piqué et un niveau de détail à s'arracher les yeux, le procédé Black and Chrome nous sert une tranche de ciné totalement fascinante. En version simple et petit prix douillet, le rachat est donc loin d'être une arnaque. Fury Road passe ainsi de l'opéra baroque ivre de couleurs à un véritable déferlement expressionniste à la fois rugueux et grouillant de matières et, une nouvelle fois, balayant tout sur son passage.
La sauvagerie se consomme ici d'une manière encore plus primitive. Les War-Boys crêvent l'écran et, comme l'a souligné Miller, l'ouverture du film aligne effectivement des compositions directement inspirées du Métropolis de Fritz Lang. Les accélérés trouvent également leur plein sens en Black and chrome: un hommage trash et punk aux courses délirantes de Buster Keaton et l'art du slapstick.
Ce qui lie les deux versions? : un glorieux et rageur retour à l'essence même, au gène premier du cinéma: Le Mouvement !!! Vous pourrez même revoir ensuite toute la trilogie originale en Noir et Blanc et vous comprendrez que toute l'oeuvre post-apo de Miller irradie et devient totalement atemporelle grâce à ce procédé. Comme nettoyée de son "petit coup de vieux". Allez, affirmons-le haut et fort : Fury Road Black and Chrome c'est l'équivalent, dans notre salon, de " l'Arrivée d'un train en gare à La Ciotat" des frères Lumière (1895) La boucle est bouclée!
Matrice ( Dossier Mad-Max - trilogie originelle )
Préquel - La chronique
L'avis des membres
Bouzak
" Rhaaa !!!!"
L'anominus
"... j'attends ce week-end pour pouvoir le regarder 5 fois de suite, de manière à prendre un peu de recul et analyser un minimum la chose..."
"... A GENOUX MÉCRÉANTS!!!
PROSTERNEZ VOUS DEVANT LE DIEU GEORGE!!!!!!!!!!!!!!!!
ET SOYEZ TÉMOINS!!!!! "
Thierry
" Shakespeare, Dante, Hugo.... J'avais oublié Homère aussi, puisqu'il y a ici comme des bribes de l'Odyssée (et de l'Iliade surtout), des fragments hagards de choeurs antiques, des débris pulvérisés et émiettés du texte homérique pour dire le combat des géants et des monstres, des guerriers en furie et bientôt chancelants. Enlèvement des Sabines, Athéna Déesse de la Guerre (Charlize Theron), soulèvements des vents, de la lumière et du sable, danse hallucinée des éléments, grandeurs et décadences de guerriers en quête de sens et de rédemption, combats des dieux et des humains entre eux. Comme une résurgence et le soubresaut malade et cependant toujours magnifique d'un monde perdu dont il ne resterait, çà et là, sur quelque gigantesque scène d'un monde de toutes désolations, que poignées éparses d'histoires anciennes, amoncelées et balayées de-ci de-là en zébrures de carnaval. Comme le tintement étonnant et furieux de quelques bimbeloteries aux milles couleurs. Troisième vision et toujours le même chant, le même élan lyrique qui traverse de part en part un spectateur réjoui et ravi d'avoir été impacté par un choc esthétique d'une aussi singulière et bouleversante ampleur. Wow....... :)) "
Steelbook 4k 3 juin 2024
2015
2H
Le Blu-ray Ô joie. C'est une démo 4K ?! Sous un subtile voile de grain, piqué, couleurs, contrastes, sont à hurler les poings fermés. On pourrait éviter d'être ridicule si le stupéfiant niveau de détail n'était pas à garder les bras levés. Non, ce qui tue, clairement, avec ce Blu-ray, c'est d'être obligé de le regarder la bouche ouverte du début à la fin. Si vous avez une femme, un compagnon, une famille, voyez-le une première fois tout seul, histoire de conserver un minimum de dignité. Si vous êtes fan de 3D (sur deux heures, perso, j'ai un peu de mal) c'est aussi du top démo. L'horizon recule grave. Le Blu-ray fait dans la profondeur abyssale et le jaillissement glorieux. You know what? I'm happy!