LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

LES CHRONIQUES DE FRANCISCO & Co

ZEROZEROZERO, la messe est dite

Série    Polar    Tragédie universelle

Stefano Sollima    Roberto Saviano

*****

 

 

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Je suis persuadé que si elle sortait aujourd'hui, cette série ferait un carton. Franchement, si un tenir un blog ciné-série conserve encore une once d'intérêt, c'est bien de permettre à mes rares et précieux lecteurs de découvrir des pépites méconnues voire oubliées. Alors, comme Puce et moi avons pris un pied pas possible à regarder ça, je me lance ...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Magistrale.

Ultra documentée, écrite de main de maître, shootée à la perfection, photographiée à l'acier, interprétée par une collection de Stradivarius et montée et mise en musique sans une seule fausse note, voici une série monumentale et terrassante. Un diamant noir.

Du très très lourd.

 

ZeroZeroZero est un missile haute précision que je me suis pris en pleine poire sans jamais baisser les yeux. Je la place dans mon top 5 des meilleures séries de la décennie. Rien que ça.

Le boîtier attendait sagement d'être visionné depuis deux ou trois ans dans ma blu-raythèque puisque cette pépite a été diffusée il y a déjà quatre ans. Alors pourquoi cette petite merveille bien dark est-elle passée globalement inaperçue ?

Je pense qu'elle a souffert d'être sortie au moment de l'explosion de la pandémie de Covid-19. La série est apparue sur Canal+ quelques jours avant le premier confinement. Nous avions tous l'esprit concentré sur l'essentiel de l'existence. Je pense que le public avait plus d'appétit pour les expériences "feel-good" que de se confronter à ce regard sans fards ni complaisance sur les mécaniques de la violence et de la corruption sur lesquelles se déploie le trafic de drogue à l'échelle internationale.

 

 

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Première raison de mon addiction :

ce chant funèbre royalement ciselé, dans sa construction comme dans sa réalisation, n'est jamais pris en défaut de crédibilité.

Ultra-violent mais jamais complaisant, tout sonne juste. L'immersion est totale et viscéralement éprouvante. Rien n'est fun ou "sexy". Tout fait vrai et fait mal. Cet univers est un ferment de souffrances et rien ici n'est douloureux gratuitement. Le processus de corruption et de déshumanisation qui contamine les protagonistes est aussi implacable que glaçant.

 

Cette force autant que finesse d'écriture n'est pas le fruit du hasard.

Au-delà de l'intelligence de la mise en scène et la performance de l'ensemble du casting, le scénario repose sur un terreau particulièrement fertile : le livre éponyme de Roberto Saviano.

Écrivain et journaliste italien, authentique "assoiffé de justice et de vérité" vivant (par conséquent) sous protection policière, ce pape de l'investigation avait déjà mis au jour les rouages de la Camorra avec Gomorra. Un phénomène d'édition distribué à plusieurs millions d'exemplaires déjà adapté au cinéma puis en série il y a dix ans par les mêmes créateurs.

Cette profonde connaissance du fonctionnement de la Mafia Italienne Roberto Saviano l'a depuis élargie à l'économie mondiale de la cocaïne. Et ce travail exemplaire a ainsi offert aux créateurs et scénaristes cette vision ultra-réaliste, parfois quasi-documentaire, rude et sans concession de ce cauchemar universel dont presque tous les pouvoirs et systèmes se nourrissent, directement ou indirectement.

 

Œuvre chorale nous conduisant de l'Italie aux États-Unis, du Mexique à l'Afrique, dans le sillage d'un navire transportant plusieurs tonnes de poudre, ZeroZeroZero impressionne aussi par cette narration au plus proche de l'humain. Chaque personnage, vendeur, acheteur ou intermédiaire, expose sa part d'ombre et son avidité à l'argent comme au pouvoir tout en dévoilant ses lâchetés et contradictions. Tous devenant, au fil des conséquences dramatiques d'une transaction virant au naufrage, tantôt bourreaux, complices ou victimes.

 

 

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Il faudrait applaudir tous les acteurs, en particulier l'intense acteur mexicain Harold Torres, mais je ne m'attarderai sur ceux incarnant le duo central du frère et de la sœur. Intermédiaires assurant le transit de la cargaison de came.

Je commence par celui, passionnant, de la frangine.

Andrea Wiseborough incarne avec autorité Emma Lynwood. Un solide personnage féminin trouble et impénétrable qui loin de jouer les faire-valoir ou la caution séduction ne cesse de prendre de l'ampleur sur un arc narratif semblable à celui de Michael Corleone. Nous la découvrons d'abord faisant la morale à son armateur de père, transporteur maritime entre les deux frères d'un cartel Mexicain et leur acheteur, un parrain de la N'dranghetta calabraise. Elle plongera malgré elle dans le combine et reprendra le flambeau avec une détermination et un courage trop souvent réservés aux figures masculines du polar. L'actrice semble s'abandonner avec délice à ce rôle de femme de pouvoir badass à souhait. Il y a quatre ans, livrer ce rôle à une femme n'était pas encore devenu la règle comme aujourd'hui. Et cette dimension féministe sans dogme ni gros sabots fait plaisir à voir.

Le visage elfique de cette actrice charismatique fascine autant qu'il interroge et instaure le mystère. J'avais repéré son magnétisme dans Oblivion, Birdman, Mandy, ou les séries Bloodline et actuellement dans The Regime. Mais, je crois que sa prestation ici l'impose comme l'une des actrices les plus intéressantes de ce nouveau siècle de cinéma.

 

Mention spéciale également à Dane DeHaan (Chronicle, The Place Beyond the Pines, A Cure for Life) dans le rôle de son frangin, jeune homme condamné par une maladie invalidante et incarnant à lui seul le corps malade de ce monde où tombent les innocents. Avec sa gueule à la DiCaprio, il joue la douleur et bouleverse en profondeur sans jamais en faire trop.

Du grand art.

 

 

 

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Oui, ZeroZeroZero, c'est du grand art.

 

Ces huit heures de survie en milieu hostile se dévorent comme une grande œuvre du septième art. De l'intime au brasier de l'action, le découpage des séquences et le tempo du montage sont bien ceux de pointures du cinéma. entre découpage savant et plan-séquences hyper immersifs le récit file droit.

Comme sur le fond, l'ensemble, visuellement, affiche une rigueur et une cohérence admirables. De Stefano Sollima (déjà réalisateur sur Gomorra la série et qui a livré le second volet plus qu'honorable de la saga Sicario) au Danois Janus Metz (Bjorg/McEnroe, Armadillo) en passant par l'Argentin Pablo Trapero (Leonera, Carancho, El Clan), les trois réalisateurs de cette série à l'unique et vibrante saison disposent tous de CV réjouissants.

Et le résultat est là.

Impérial.

 

 

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Sans manichéisme ni maniérisme hors propos, ces huit épisodes jouant de l'ellipse et du flash-back avec une intelligence rare et carrément addictive nous font ainsi naviguer en eaux grises dans un univers écrasant, suffocant et implacable où la trahison et la cruauté la plus extrême gouvernent.

 

ZeroZeroZero dresse un état des lieux effarant qui ne laisse aucun espoir quant à une hypothétique reprise en main des autorités sur cette économie parallèle aussi florissante que dévastatrice. "La messe est dite" semble chuchoter en permanence ce sombre chef-d'œuvre qui va plomber la concurrence pour un bon moment et dont on sort aussi sonné qu'ébloui.

 
 
 

 

 Francisco, 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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2019-2020

 

 

8 x 50mn/1h

 

 

 

 

Le Blu-ray          La photographie affutée d'un tournage en 4K ne laisse échapper aucun détail. Un spectacle aussi somptueux visuellement qu'éprouvant moralement.

 

 

 

 

Series Directed by 

Janus Metz ... (3 episodes, 2020)
Pablo Trapero ... (3 episodes, 2020)
Stefano Sollima ... (2 episodes, 2019)

Series Writing Credits  

Leonardo Fasoli ... (creator) (8 episodes, 2019-2020)
Leonardo Fasoli ... (story) (8 episodes, 2019-2020)
Leonardo Fasoli ... (teleplay) (6 episodes, 2019-2020)
Mauricio Katz ... (creator) (8 episodes, 2019-2020)
Mauricio Katz ... (story) (8 episodes, 2019-2020)
Mauricio Katz ... (teleplay) (4 episodes, 2019-2020)
Roberto Saviano ... (based on the book by) (8 episodes, 2019-2020)
Stefano Sollima ... (creator) (8 episodes, 2019-2020)
Stefano Sollima ... (story) (1 episode, 2019)
Stefano Sollima ... (teleplay) (1 episode, 2019)
Max Hurwitz ... (story) (4 episodes, 2020)
Max Hurwitz ... (teleplay) (3 episodes, 2020)
Maddalena Ravagli ... (teleplay) (2 episodes, 2020)
Stefano Bises ... (story) (1 episode, 2019)

Series Cast  

Andrea Riseborough Andrea Riseborough ...  Emma Lynwood8 episodes, 2019-2020 
Dane DeHaan Dane DeHaan ...  Chris Lynwood8 episodes, 2019-2020 
Giuseppe De Domenico Giuseppe De Domenico ...  Stefano La Piana6 episodes, 2019-2020 
Harold Torres Harold Torres ...  Manuel Contreras6 episodes, 2019-2020 
Francesco Colella Francesco Colella ...  Italo Curtiga6 episodes, 2019-2020 
Diego Cataño Diego Cataño ...  Chino6 episodes, 2019-2020 
Víctor Huggo Martin Víctor Huggo Martin ...  Enrique Leyra6 episodes, 2019-2020 
Adriano Chiaramida Adriano Chiaramida ...  Don Damiano 'Minu' La Piana5 episodes, 2019-202

 

Full cast & crew

 

 

 

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08/04/2024
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